Fonction expressive, soulever le voile des sentiments


Peut-on tout dire dans le cadre d’une séance d’hypnose ? Pourquoi pas. Mais si c’est une demande d’aide provenant du client, dont la souffrance se situe à ce niveau-là, c’est-à-dire d’un blocage au niveau de la fonction expressive, comment y répondre ? Je dirais que même un poète expert, qui a l’expérience d’avoir cherché à formuler ce qu’il ressent avec la précision la plus poussée, n’arrive pas à vraiment à tout dire de manière littérale. C’est pourquoi il se sert du pouvoir des métaphores, c’est-à-dire d’images qui font référence à une chose par ressemblance. Comme le soleil en tant qu’objet peut être utilisé pour évoquer la lumière, ou même la clarté au niveau psychique, c’est-à-dire une sensation bienfaisante, rassurante. Alors que le nuage noir pourrait au contraire symboliser une psyché chargée de problèmes, de doutes, d’insatisfactions.

Alors on prend une image pour dire une chose. Avec une limite cependant, car quand on est dans la métaphore on n’est pas précis. Si on a l’exigence de dire les choses avec précision il faut les situer dans l’espace et le temps. Il faut dire où ça c'est passé, quand ça c'est passé. C’est là où apparaît un autre concept, très aidant pour aider à situer une personne dans l’espace et le temps, qui est celui d’histoire de vie. Pouvoir visualiser sa vie comme une histoire, qui évolue, de chapitre en chapitre, voilà une sorte d’idéal de clarté, que je propose de tenir comme valable. En récitant l’un ou l’autre chapitre de son histoire de vie, une personne peut aussi utiliser des métaphores, pourquoi pas, mais alors celles-ci ne flottent pas dans une espèce de cadre irréel, au contraire elles sont directement liée à des lieux et des époques qui sont enregistrées dans la mémoire sous la forme d’une trajectoire de vie, linéaire, de la naissance au présent, ouvert sur la possibilité d’un futur.

Le questionnement ou auto-questionnement précis, sur la base des mots interrogatifs “qui”, “quoi”, “où”, “quand”, et même “comment”, permettent de composer des énoncés dans un contexte où l'objectivité est en rapport avec une trajectoire de vie, c'est-à-dire à des événements historiques réellement vécus. J'ai évité la question “pourquoi”, car celle-ci entraîne dans le domaine abstrait des conjectures, suppositions d'enchaînements de causes et d'effets qui ne sont pas forcément contrôlées par des faits. Evidemment, si les événements de la vie personnelle sont difficiles à raconter en tant qu'expériences marquantes car les sensations restées dans la mémoire sont encore si fortes qu'elles empêchent l'identification précise des choses à situer, il faut commencer par parler de cette sensation, et par le biais de métaphores. S'attarder sur une image, de la vérité d'une sensation pour éventuellement décerner, au bout d'un moment, quelques objets plus précis. Cette expression métaphorique, qui est celle du poète par excellence sert surtout à évoquer des sentiments et des sensations qui dépassent l'entendement. Les métaphores nous transportent, c'est d'ailleurs la signification étymologique du mot, qui vient du grec meta (au-delà, d'un lieu à l'autre) et pheros (porter). Mais les métaphores peuvent aussi transporter au-dedans, du moment qu'on les utilise en restant connecté à l'intention de rendre plus consciente la trajectoire de vie personnelle.


retourSaresca 13/08/2017